Droit de préemption urbain

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maison fond de jardin

Dans certaines zones urbaines, les communes ont le droit d'acquérir en priorité des biens immobiliers mis en vente par les personnes privées. C'est le droit de préemption urbain. Ce droit est notamment réglementé par les articles L. 211-1 à L. 211-7 du Code de l'urbanisme. Voyons ses dispositions en détail.

 

 

Droit de préemption urbain : quels biens, pour quels objectifs ?

Le droit de préemption urbain peut viser différents types de biens immobiliers. Il doit poursuivre certains objectifs.

Biens immobiliers des personnes physiques ou morales

Le droit de préemption urbain permet à une personne publique d'acquérir les biens immobiliers suivants :

  • appartements ;
  • immeubles ;
  • maisons individuelles ;
  • terrains ;
  • biens immobiliers appartenant à des personnes physiques (des individus) ou à des personnes morales (sociétés).

Justification du droit de préemption urbain

Le droit de préemption urbain doit permettre notamment aux personnes publiques de constituer des réserves foncières afin de réaliser leurs aménagements urbains d'intérêt général (article L. 210-1 du Code de l'urbanisme). Ce peut être en particulier l'une des opérations suivantes (article L. 300-1 du Code de l'urbanisme) :

  • maintien, extension ou accueil d'activités économiques ;
  • développement des loisirs et du tourisme ;
  • construction d'équipements collectifs ;
  • construction de locaux d'enseignement supérieur ou de recherche ;
  • lutte contre l'habitat insalubre, indigne ou dangereux ;
  • renouvellement urbain ;
  • sauvegarde ou mise en valeur du patrimoine bâti ou non bâti ;
  • construction de logements sociaux.

Procédure relative au droit de préemption urbain

Le droit de préemption urbain peut être exercé par la commune ou par le représentant de l'État dans le département.

Délibération communale

Concernant la commune, elle doit procéder de la manière suivante :

  • Une délibération communale doit délimiter les zones qui peuvent faire l'objet d'une préemption :
    • cette délibération doit préciser l'objectif de la préemption ;
    • la délibération doit être affichée en mairie pendant 1 mois ;
    • la délibération doit aussi être publiée dans un journal diffusé dans le département.
  • Le propriétaire qui souhaite vendre un bien immobilier situé dans la zone de préemption doit en informer la commune. En pratique, il indique le prix auquel il veut vendre.
  • Dans les 2 mois suivant cette information, la commune peut renoncer à acquérir le bien immobilier. Cette renonciation est définitive : la commune n'a pas le droit de revenir dessus. Si la commune ne se manifeste pas dans ce délai de 2 mois, cela signifie qu'elle renonce à préempter le bien immobilier.
  • C'est aussi dans ce délai de 2 mois que la commune peut décider d'acquérir le bien immobilier en priorité, soit au prix fixé par le vendeur, soit à un autre prix, que la commune précise.
  • Le propriétaire du bien immobilier ne peut plus alors le vendre qu'à la commune (sous réserve de recours en justice). Mais, s'il n'est pas d'accord avec le prix que propose la commune, il a 2 mois pour le notifier à celle-ci. Il peut d'ailleurs renoncer à vendre son bien immobilier à qui que ce soit.
  • Quand la commune et le propriétaire du bien immobilier sont d'accord sur les conditions de la vente, ils signent un acte notarié.
  • Dans les 6 mois suivant cette signature, la commune doit payer le bien immobilier. Le propriétaire du bien immobilier en conserve la jouissance tant que le prix ne lui a pas été intégralement payé.

Précision : en principe, le propriétaire du bien immobilier peut demander que la commune acquière la totalité dudit bien. Si la commune n'acquiert qu'une partie du bien immobilier, le prix d'achat doit tenir compte du préjudice que subit le cas échéant le propriétaire, à qui il ne reste que l'autre partie du bien, éventuellement dépréciée.

Recours contre une préemption

La décision de préempter peut être contestée devant le tribunal administratif. Cette action en justice doit être exercée dans les 2 mois suivant l'affichage de la décision en mairie. Elle peut être exercée par le propriétaire du bien immobilier préempté. Elle peut aussi être exercée par la personne avec laquelle le propriétaire avait conclu un compromis de vente.

Si la décision de préempter est annulée par le tribunal administratif, le propriétaire du bien immobilier peut le vendre à qui il veut.

Mais, si la vente à la personne publique (la commune) s'est déjà faite, elle est annulée et l’article L.  213-11-1 du Code de l’urbanisme impose à la collectivité de proposer la rétrocession du bien qui a été à tort préempté. Dans 3arrêts du 28 septembre 2020 (n° 430951, 436978 et 432063), le Conseil d’État est venu préciser le régime de cette rétrocession. Si le bien n’a pas été entre temps cédé à un tiers, la collectivité doit :

  • vérifier que le rétablissement de la situation initiale ne porte pas une atteinte excessive à l'intérêt général ;
  • si c’est le cas, proposer à l'ancien propriétaire d’acquérir le bien ;
  • puis, le cas échéant, le proposer à l'acquéreur évincé (quand bien même son nom n’était pas indiqué dans la déclaration d’intention d’aliéner).

Attention : dans les 5 ans suivant la vente de son bien immobilier à la commune, l'ancien propriétaire peut demander à la commune que ledit bien lui soit rétrocédé, si les objectifs affichés de la préemption n'ont pas été respectés. Si la commune fait à l'ancien propriétaire une offre de rétrocession, l'ancien propriétaire a 2 mois pour répondre, soit qu'il accepte l'offre, soit qu'il veut racheter le bien à un autre prix, soit qu'il renonce au rachat. Faute d'accord dans les 2 mois, l'ancien propriétaire ou la commune peut saisir le tribunal judiciaire.

À noter : en cas de litige judiciaire entre la mairie et le propriétaire, ce dernier reste redevable de la taxe foncière pendant la durée du litige, même s'il ne peut pas disposer du bien (rép. min. Sénat n° 08934 du 18 avril 2019).

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